Mes vacances sans plastiques, drole ou pas

Publié par Arnaud Le Berrigaud le

Mes vacances sans plastiques ; drôle ou pas du tout

PROLOGUE

Alertés par la presse écrite, les reportages TV, les ONG, mais aussi par Marion et Jules nos jumeaux ados de 16 ans qui sont en plein « trip écolo », nous essayons de comprendre l’acharnement autour du plastique. Nous avons donc décidé de passer une semaine de vacances en séminaire « plastic free » en famille. « Plastic free » ça veut dire « ma vie sans plastique » grosso modo et j’imagine que c’est une idée du service marketing parce que ça sonne mieux en anglais ; Ils sont top !

JOUR 1

21h30 : nous arrivons au complexe hôtelier où nous allons passer 6 jours. La réception est fermée. Ils nous ont laissé un mot : « Sur ce plan, l’emplacement de votre tipi », écrit à la craie sur une ardoise. Original. Et oui, un tipi ! C’est rudimentaire mais c’est sans plastique. C’est top ! Juste des poteaux en bois, une toile en coton et de la corde naturelle. J’aime beaucoup cet esprit nature et authentique. 

Cet endroit est vraiment magnifique. J’ai hâte de profiter de tout …. Et sans plastique surtout ! 

Il est 22h, on a mangé nos sandwichs, froids, on est heureux. Je sens qu’on va se plaire ici. 

JOUR 2

6h00 : nous nous réveillons. En attendant que quelqu’un arrive, nous restons un peu sous les couvertures, en laine, au chaud. Ça gratte un peu mais c’est tellement nature. 

8h00 : ça fait deux heures que nos ados trépignent mais heureusement, ils ont leur téléphone, surfent sur la toile et échangent avec leurs amis : « on vous enverra des photos de nos supers aventures dans ce monde sans plastique ». Ça y est, la réception est ouverte et nous allons pouvoir commencer notre vie sans plastique. J’ai hâte de commencer cette désintoxication. 

8h15 : Marion et Jules ont fait la grimace quand il a fallu mettre les portables dans un casier fermé à clé pour toute la durée du séjour : pas de plastique ils ont dit ! Mais on pense avec leur maman que ça en vaut la peine. Et puis des activités il y en aura d’autres. Pas de photo ni de message mais des souvenirs plein la tête.

Je n’avais jamais bu de café dans un bol en bois. C’est étonnant ce petit goût qui reste en bouche. C’est l’huile de colza qui sert à préserver le bol m’a-t-on dit ; on s’y fait finalement, ou presque. J’ai demandé pourquoi ils n’utilisaient pas de gobelets en carton et ils m’ont dit que c’est parce qu’il y avait une couche de plastique à l’intérieur pour assurer l’étanchéité. Ben oui forcément, je n’y avais jamais pensé ! Les couverts en bambou ça colle un peu au palet par contre. On s’habituera aussi …. C’est chouette de respirer cet air pur. Qu’est-ce qu’on est bien ici !

On nous a remis un kit hygiène : fini le plastique dans la salle de bain. Un savon solide pour tout, le corps, les cheveux, les dents, la vaisselle, la lessive et une brosse à dents en bois ; je ne sais pas en quoi sont faits les poils mais j’ai hâte de tester tout ça. C’est magique !

Aujourd’hui, dimanche, il n’y a pas d’activités organisées alors on en a profité pour faire de la rando avec carte d’état-major en papier, aidés d’une boussole 100% en acier. On s’est un peu perdus. C’est vrai qu’avec le GPS du portable c’est plus simple ! 4 heures de marche en plus mais que c’est beau ici !

Ce soir on a diné dans des contenants consignés en verre : 10 euros la consigne par personne, ça pique mais c’est écologique. Heureusement on avait des espèces car la carte bleue est interdite car en plastique. On a mangé de succulents fruits présentés sans emballage plastique et qu’on avait récupéré dans des sachets papier, ben oui, il faut être en harmonie avec la forêt environnante.

JOUR 3

Une journée formidable, sans plastique, a commencé. C’est fou ce qu’on s’en passe vite du plastique. Il n’y en a vraiment nulle part, c’est bien foutu. Pas de gaine électrique donc pas d’électricité. Pour la toilette, c’est dans le ruisseau pour éviter tous les flexibles plastiques. On fait la cuisine sur des feux de camp pour éviter les réchauds car les joints entre bouteille de gaz et brûleur sont en plastique. Fallait y penser ! C’est plus long, plus délicat et incertain mais authentique. On a mangé brulé mais c’est ça aussi l’aventure. C’est ce qu’on nous avait promis et nous ne sommes pas déçus.

C’est rigolo le soir après diner, on se retrouve tous à faire notre vaisselle. Y’a les mamans aussi qui nettoient les couches lavables des bébés …. Comme au temps de nos grands-parents ; et dire qu’on avait oublié tout ça.

Ils annoncent un peu de pluie cette nuit …. Des souvenirs d’enfance en colo, la pluie sur la tente, on s’amusait bien avec les copains.

Y’a un gars le soir qui joue du tamtam. On aurait préféré une guitare. Il nous a dit qu’on lui avait confisqué en arrivant car ses cordes étaient en nylon, du plastique en quelque sorte.

JOUR 4

Je m’étais demandé en découvrant le tipi comment ça marchait en cas de pluie. Et bien ça passe à travers le coton et ça nous a coulé dessus une partie de la nuit. Ils auraient quand même pu faire une exception et mettre quelque chose d’étanche pour la nuit.

Aujourd’hui, canoé. Génial ! On a eu un peu de mal à les mettre à l’eau car ils sont super lourds. Ils ont été taillés dans le tronc d’un arbre qui devait peser 200kg, c’est pas possible. Eh oui, les matériaux composites, plus légers, c’est du plastique ! Je me suis fait mal au dos en poussant le canoé et les ados, qui font la gueule depuis hier à cause des téléphones interdits, ne nous ont pas aidés. Ça commence mal avec eux mais c’est pour le bien de cette génération !

Mais avant, on a fait les courses à l’épicerie du village. Courses en vrac. Ils nous ont loué des bocaux en verre, 10 euros pièce eux aussi, pas de plastique ici non plus. C’est super lourd et Jules en a cassé un en sortant du magasin. Ça va nous coûter 10 balles ce bocal ! … c’est abusé je trouve ! Il s’est coupé en ramassant les morceaux. On a fait un pansement avec un mouchoir en coton parce que forcément y a pas de plastique non plus, dans la boite à pharmacie. Le coton du pansement c’est comme la toile de tente, ça éponge et ça traverse. Un pansement plastifié au moins ça aurait protégé !

On est parti à la journée. C’est là que tu te souviens qu’une glacière c’est fait avec du plastique qui a de bonnes qualités thermiques et permet d’éviter les échanges de chaleur. Le pâté était tiède et la bière chaude. On espère ne pas être malade la nuit prochaine. L’autre avec son tamtam le soir, ce serait bien qu’il arrête plus tôt pour que l’on puisse récupérer un peu.

JOUR 5

On n’a pas été malades et tant mieux. Car il a plu toute la nuit et on a dû écoper à tour de rôle. J’en parlerai à l’accueil car je pense qu’il y a des limites à tout. Qu’est-ce que ça coûte de mettre une bâche en plastique à usage unique par temps de pluie franchement ? C’est si pratique !

Je me suis levé à 3h pour aller aux toilettes, sans lumière parce qu’il n’y en a pas, forcément ! pas de gaine pas d’électricité et pas de lampe torche fournies car y a toujours un bout de plastique là-dedans ! Pour supprimer la lunette en plastique des toilettes, j’imagine, ils ont préféré des toilettes à la turque. J’ai mis le pied dedans, évidemment. 

Journée jeux de société et cartes, dont un jeu qui apprend à vivre sans plastique. Le gars qui a inventé ça il n’a jamais habité en famille à Paris, à 4 dans 60m², c’est pas possible. A moins de rester ici dans ce coin paumé à vie, c’est impossible à pratiquer. Et ici franchement on n’a pas envie d’y rester.

Je ne sais pas dans quoi ils conservent la nourriture dans le camp pour les repas, mais plus on avance dans la semaine plus les aliments semblent avariés. On ira tous chez le médecin en rentrant. J’ai vraiment peur d’être contaminé. Au moins, à la maison, on a un réfrigérateur et on achète les aliments dans des emballages complètement étanches qui nous permettent de conserver les produits sans soucis. Et quand ils sont vides nos emballages, on les met dans la poubelle jaune ; c’est quand même pas compliqué ! Et manger 5 fruits et légumes par jour, il faut le faire très vite et pas dans les derniers jours ici, les fraises sans emballages plastiques barrière commencent déjà à tirer la tronche.

JOUR 6 

Je n’ai pas dormi de la nuit. Entre la pluie qui nous dégouline direct dessus, le mal de ventre sûrement dû à un truc avarié et la peur d’aller aux toilettes, je suis crevé ! 

Dernier matin à utiliser cette cochonnerie de brosse à dents. Les poils se coincent entre les dents. Je suis rendu au manche tellement c’est nul. Et j’ai trouvé ce que sont les poils : du nylon, un polyamide très utilisé, du plastique donc. On nous prend vraiment pour des cruches !

Ras le bol aussi de ces couches lavables qu’il faut supporter à chaque fois qu’on va au lavabo. 

On part cet après-midi ! On est crevés ! A bien y réfléchir, nous allons revoir notre mode de consommation, certainement plus responsable mais en gardant les pieds sur terre. 

Epilogue

Ceci est une satire, du second degré, pour mettre en évidence une piste que peu sont prêts à prendre mais sur laquelle beaucoup communiquent. On nous vend du rêve. J’ai grossi le trait et je me suis amusé je l’avoue. C’est pourtant la caricature de ce que je peux constater très souvent.

Nos grands-parents ou arrière-grands-parents vivaient sans plastique et de façon rudimentaire. Ça semblait les satisfaire car ils n’avaient pas de moyen de comparaison. Depuis notre société de consommation a évolué : praticité, sécurité notamment alimentaire, transport, coût … Le plastique a des fonctions et rend bien des services.

Sommes nous collectivement prêts à changer de mode de vie pour un retour en arrière ? Vraisemblablement pas. C’est aujourd’hui un matériau qui est visé alors que le R de réduction devrait être réservé à la Réduction de nos émissions de carbone et/ou à la Réduction du poids et/ou à la Réduction des multimatériaux complexes difficilement recyclables. Le R de la « Raison » ou de la « Rationalité » est en France pour le moment un vœu pieu mais un autre R est peut être le plus important et qui devrait être une priorité : « Repenser » notre consommation globale. 

Arnaud LE BERRIGAUD

Président d’ALB EXPERT PACK

Catégories : Non classé